La playlist littéraire de la semaine rend hommage à Christina Rossetti, une poétesse britannique de l’époque victorienne. Toujours en avance sur leur temps, ses textes, souvent empreints d’une douce mélancolie, se lisent tard le soir, alors que le bruit de la pluie rythme les minutes qui passent. Féministe, pacifiste avec un penchant antispéciste, elle a laissé une œuvre importante, bien plus reconnue après sa mort que de son vivant. Virginia Woolf a même écrit un essai à son sujet, intitulé I am Christina Rossetti. Voici pour nous l’occasion de célébrer sororité et féminisme le temps d’une lecture.
On décrit souvent la couleur de leurs cheveux, celle de leurs yeux, de leur peau. On s’attarde sur les courbes de leurs hanches et la longueur de leurs jambes. Les entends-tu ? Lorsqu’elles déambulent dans les rues, plus rien ne leur appartient. Que disent-elles ? Offertes aux commentaires et aux regards qui en disent long, elles subissent l’invective. Celle qui résonne en réaction à quelques bas en nylon. Pourtant, quand arrive la nuit et qu’enfin, elles se réunissent dans ce lieu clandestin, plus rien ne les oppresse, plus rien ne les menace. Les cherches-tu ? Un peu de liberté. Aux souvenirs se mêlent amour et espoir de lendemains heureux, de danses sans fin. Elles rêvent d’indépendance et de libre arbitre, d’une voix qui jamais ne leur serait volée. Pourquoi cries-tu ? Lointain, l’écho de ceux qui se parent d’un moi aux allures divines, spécialistes de la parole qui blâme, alors qu’en eux tout est petit, à la hauteur des dévots de l’ignorance, des fanatiques du mépris, des tartufes de la suffisance. Il y a ici toutes celles que l’on admire et qui luttaient, luttent et lutteront encore. Pourquoi te débats-tu ? Elles se retrouvent quand tu ne regardes pas, toi, monarque crétin en ton royaume d’idiotie. As-tu oublié le sens des mots ? Olympe de Gouges, Chimamanda Ngozi Adichie, Betty Friedan, Toni Morrison, Christina Rossetti, Assata Shakur, Angela Davis, Amy Poehler, Kathleen Hanna, Susan Faludi, Carrie Brownstein, Amy Tan, Naomi Klein, María Jesús Alvarado Rivera, Hildegarde de Bingen, Sampat Pal Devi, Sylvia Rivera, Simone de Beauvoir, Maxine Hong Kingston, Audre Lorde, Virginia Woolf, Anna Julia Cooper, Leslie Feinberg, Marion Zimmer Bradley, Nawal el Saadawi… Leur écho n’en finira jamais de te répondre. D’opposer à ta bêtise la beauté de leur chant.
Annabelle Gasquez
Echo
Come to me in the silence of the night;
Come in the speaking silence of a dream;
Come with soft rounded cheeks and eyes as bright
As sunlight on a stream;
Come back in tears,
O memory, hope, love of finished years.
O dream how sweet, too sweet, too bitter sweet,
Whose wakening should have been in Paradise,
Where souls brimfull of love abide and meet;
Where thirsting longing eyes
Watch the slow door
That opening, letting in, lets out no more.
Yet come to me in dreams, that I may live
My very life again though cold in death:
Come back to me in dreams, that I may give
Pulse for pulse, breath for breath:
Speak low, lean low
As long ago, my love, how long ago.
Christina Rossetti, Goblin Market and Other Poems, 1862.
Traduction disponible ici.
Tracklist :
- Ishmael — Careful Now (You’re on Your Own)
- Raime — Stammer
- Peaches — Free Drink Ticket
- The KVB — Never Enough
- Black Mountain — Don’t Run our Hearts Around
- Andy Stott — I Heard Them Say (Andy Stott Remix)
- Kangding Ray — NN/Peaks
- Gold Panda — Autumn Fall
- Nite Jewel — You Now
- Wye Oak — Too Right
- Sarah Neufeld — Chase The Bright and Burning
Pour celles et ceux qui préfèrent Spotify, c’est par ici.
Image de une : illustration de textes d’Edgar Allan Poe © Alberto Martini