Le « F-World » de ce premier jour de novembre est consacré à l’artiste, écrivaine et éducatrice afro-américaine Margaret Taylor-Burroughs.

 

We black people must be born again.
Know that the black people like other races
Have their own distinct beauty,
Know that the Stygian night too is beautiful.
– Extrait de The Beauty of Black, Margaret Taylor-Burroughs, 22 mai 1965.

 

Margaret Taylor-Burroughs naît le 1er novembre 1915 sous le nom de Victoria Margaret Taylor. Elle grandit à Chicago, où sa famille s’installe alors qu’elle est seulement âgée de 5 ans. La jeune fille fait ses études au sein d’écoles publiques et, adolescente, devient élève au lycée d’Englewood. C’est ici que commence son engagement. Elle rejoint rapidement le conseil des jeunes de la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP Youth Council), une organisation créée en 1909 et œuvrant pour les droits civiques aux États-Unis.

À 22 ans, Margaret obtient son diplôme de professeure à l’Université d’État de Chicago. En 1939, elle aide à la création du South Side Community Art Center, un centre social et communautaire dédié à la mise en lumière d’artistes afro-américain-e-s. Puis, en 1946, la jeune femme décroche son Bachelor of Arts à l’École de l’Institut d’art de Chicago. Deux ans après, elle valide sa maîtrise. Un parcours sans faute et brillant qui lui donne des clés pour comprendre l’importance de la passation des savoirs. Professeure durant plus de 20 ans au lycée DuSable de Chicago (1946 à 1969), Margaret Taylor-Burroughs exerce ensuite au Kennedy-King College jusqu’en 1979. Pourtant, cette activité éducationnelle n’est que l’une des facettes de son incroyable parcours.

Margaret Taylor-Burroughs a marqué son temps de multiples manières. Poétesse, artiste, autrice, éducatrice, elle œuvre continuellement afin de créer des espaces privilégiés d’expression pour les créateurs et créatrices noir-e-s. En 1961, elle  cofonde notamment le DuSable Museum of African American History de Chicago aux côtés de son mari, Charles Burroughs.

Infatigablement, Margaret Taylor-Burroughs fait preuve d’une grande militance. Toute sa vie, elle écrit, souhaitant partager l’expérience des Noir-e-s aux États-Unis à travers ses mots et son imagination, en particulier avec les plus petit-e-s. Elle peint, sculpte, fait de la gravure. Son but ? Sensibiliser les enfants à leur culture, à leur identité, mais aussi aux arts.  La question raciale est une part prégnante du travail de Taylor-Burroughs. Dans certaines de ses linogravures, elle met en scène des sujets dont les visages sont blancs, noirs ou les deux à la fois (In The Faces of My PeopleMy People). Par son talent, elle veut recentrer son message autour d’une humanité partagée. Pour autant, celle qui est influencée par Harriet Tubman, Frederick Douglass ou encore W.E.B. Du Bois dénonce aussi les obstacles, les barrières et les réalités de la société raciste dans laquelle elle évolue. Durant les années 1950 et 1960, Margaret publie de nombreux ouvrages jeunesse. Elle est aussi une poétesse talentueuse, comme en témoignent ses recueils de poésie What Shall I tell My Children Who are Black? (1968) et  Africa, My Africa! (1970).

L’héritage laissé par Margaret Taylor-Burroughs est sans équivoque. Cette artiste prolifique et grande pédagogue a participé à la fondation d’institutions destinées à visibiliser et à soutenir le travail artistique des personnes afro-américaines sur le long terme. Son action a profondément changé la société. Le DuSable Museum est aujourd’hui le plus vieux musée des États-Unis dédié à la culture noire. Sa collection permanente est riche de 13 000 œuvres et livres, et la structure accueille très régulièrement des programmes éducatifs : « Beaucoup de musées consacrés à la culture noire ont ouvert [depuis la création du DuSable Museum], mais le nôtre est le seul à être né de la communauté autochtone noire. […] Tout a commencé avec des personnes ordinaires », explique-t-elle au magasine Black Entreprise en 1980.

Margaret Taylor-Burroughs meurt chez elle, à Chicago, le 21 novembre 2010. Elle a 95 ans. Sa volonté et sa résolution d’apporter quelque chose de positif à sa communauté, mais aussi de laisser des outils aux générations suivantes étaient au cœur de sa démarche artistique, professionnelle, militante. Et en 2018, cette démarche est encore essentielle.

 


Image : Portrait de Margaret Taylor-Burroughs, photographiée par Sherwood E. Fohrman dans le cadre de sa série « Faces of Chicago ».  © DR