Pour sa rentrée littéraire sur Deuxième Page, Wendie Zahibo nous a confié : « J’ai une très mauvaise mémoire. Je ne sais pas retenir le nom des personnages des ouvrages que je lis. En revanche, il y a quelque chose que je n’oublie jamais : les émotions que certains livres ont le pouvoir de me faire ressentir à un moment X ou Y. » La jeune femme t’a donc fait une sélection de lectures pour t’inspirer, te motiver, te bousculer.
La voix est le miroir de l’âme : Mémoires d’une diva engagée
Autrice : Angélique Kidjo
Date de sortie : 2017
Prix : 22 €
J’ai mis ce livre en numéro 1 de ma liste car il s’agit du premier livre que j’ai lu après une longue phase « d’abstinence de lecture ». Je ne prenais aucun plaisir à lire, je trouvais cela chiant, aucune histoire ne me faisait vibrer. Un jour, un ami de passage à Paris m’a offert ce bouquin. Je connaissais Angélique Kidjo de nom, mes parents l’écoutaient lorsque j’étais petite, mais je ne savais pas grand-chose sur sa vie. Dès la découverte du titre, j’ai su que ce livre allait me plaire. De plus, je n’avais jamais eu la chance auparavant de lire l’autobiographie d’une femme noire francophone. Étant en pleine période de développement pour mon projet, ça tombait à pic. Ce livre m’a marquée car il était d’une certaine manière un miroir de mes ambitions. Je voyais en cette femme-là, en cette femme noire africaine − béninoise plus précisément − dont le talent a dépassé les frontières, un modèle, un exemple à suivre. Ce livre a réveillé mon envie de lire, mon envie d’aller puiser de l’inspiration dans les parcours de femmes d’exception. J’avais simplement besoin de me sentir représentée dans les ouvrages que je consommais.
Si tu veux lire La Voix est le miroir de l’âme, tu peux te rendre directement chez ton libraire ou consulter le site des Librairies indépendantes.
Americanah
Autrice : Chimamanda Ngozi Adichie
Date de sortie : 2016
Prix (folio) : 8,90 €
Tu te souviens de mon ami de passage qui m’a offert l’autobiographie d’Angélique Kidjo ? Eh bien, c’est le même qui m’a offert Americanah, de Chimamanda Ngozi Adichie. Il a eu un rôle important dans ma réconciliation avec les livres. Je connaissais déjà cette autrice grâce à son célèbre TEDx « We should all be feminist ». Mais je n’avais jamais eu l’occasion de lire un de ses ouvrages. Je l’ai dévoré en 3 jours chrono. Je n’arrivais plus à m’arrêter. Je me sentais tellement proche du personnage principal : son histoire d’amour de jeunesse, son arrivée aux États-Unis, son « intégration », son retour au Nigeria, son amour pour l’écriture, son expérience de femme noire dans ce monde. Americanah soulève beaucoup de questions que nombre de femmes noires à la double culture se posent : quelle place laisser à la tradition ? Comment trouver sa place ? Comment se sentir chez soi après avoir quitté un pays pendant plusieurs années ? Comment gérer sa double culture ? Étant bercée par différentes cultures – ivoirienne, centrafricaine, guadeloupéenne et française –, j’avais enfin, avec ce livre, une autrice qui traduisait parfaitement ce que je pouvais ressentir.
Americanah est disponible dans la plupart des librairies. Tu peux aussi te rendre directement ici.
King Kong Théorie
Autrice : Virginie Despentes
Date de sortie : 2007
Prix (poche) : 6,10 €
C’est clairement la première claque littéraire que j’ai prise. Ce bouquin m’a chamboulée, bousculée, retournée… Je ne savais pas que ce type de littérature existait, je ne savais pas que des femmes aussi badass que Virginie Despentes existaient, bref, ce fut une véritable révélation. Ce qui est intéressant, c’est que j’ai découvert King Kong Théorie alors que j’étais en pleine phase de questionnement sur ma sexualité, mon rapport au corps, mon rapport aux hommes. Et voilà que Virginie Despentes entre dans ma vie et repousse les limites de mes questionnements. J’ai accueilli cet ouvrage comme un vent de liberté. King Kong Théorie parle des femmes, du corps des femmes, de sexualité, de violences sexuelles, du viol, de pornographie, de prostitution. Il fait voler en éclat les tabous. Il dit haut et fort ce que nous pouvons vivre en tant que femmes. Il est positivement sombre. Pas de place pour les faux-semblants, l’autrice n’essaye pas d’enjoliver ses mots pour faire plaisir : elle dit, crache une vérité crue que l’on a tendance à vouloir étouffer. Virginie Despentes, c’est mon woman crush everyday.
No Home
Autrice : Yaa Gyasi
Date de sortie : 2018
Prix (poche) : 8,10 €
En voilà un autre que j’ai dévoré et qui m’a bouleversée. Mais nous ne sommes pas dans le même registre que Despentes. No Home, c’est un roman que l’on doit à l’autrice ghanéenne Yaa Gyasi. Il raconte la destinée bouleversante de deux sœurs lors de la période de la traite négrière et de l’esclavage au Ghana. Ce qui est novateur avec cet ouvrage, c’est qu’il ne s’arrête pas à cette période. On continue de suivre le parcours, l’histoire de la descendance respective de ces deux sœurs sur trois siècles différents, ce qui nous amène en fin d’ouvrage à la période contemporaine. Ce travail d’histoire et de généalogie m’a vraiment touchée. La manière dont est pensé l’esclavage, ou plutôt la manière de nous le raconter dans les milieux scolaires ou dans les médias nous pousse à avoir l’impression que cette période de l’histoire est loin de nous. Or, Yaa Gyasi, de façon juste et précise, nous montre qu’il suffit en réalité de remonter trois générations pour être au cœur de cette période, et que les deux qui la suivent ne sont pas beaucoup moins sombres. On y découvre également un bout d’histoire du Ghana, ses ethnies, ses traditions, sa culture. No Home est particulièrement bien écrit et il laisse un petit pincement au cœur lorsque l’on arrive à la fin. On aimerait en avoir plus.
Pimp : Mémoires d’un maquereau
Auteur : Iceberg Slim
Date de sortie : 2015
Prix (poche) : 7,80 €
Je n’avais jamais entendu parler de cet auteur avant de le découvrir grâce à l’humoriste américain Dave Chapelle, qui recommandait son ouvrage. Étant une grande fan de Dave Chapelle, je me suis empressée de le commander, et le moins que l’on puisse dire, c’est que je n’ai pas été déçue. Ce roman est une autobiographie d’Iceberg Slim, un homme qui souhaitait devenir le plus célèbre pimp de Chicago. On plonge dans les bas-fonds de l’Amérique des années 1940, 1950 et 1960. Sexe, drogue, violence et prostitution rythment chaque page. Ce livre fait froid dans le dos tant il est cru, brut, farouche, glacial… Mais il est également nécessaire. Il donne une claque de vérité, il met de côté toute hypocrisie et, parfois, ça fait un bien fou.
Pour suivre tout le travail de Wendie Zahibo, rendez-vous sur son super webzine Reines Des Temps Modernes, sa page Facebook et son Twitter. La jeune femme réédite d’ailleurs l’ouvrage Reines des temps modernes, qui sera disponible sur son site en novembre 2018. En parallèle, elle prépare une exposition en collaboration avec une illustratrice pour le mois de décembre, à Paris.
Image de une : montage réalisé par Deuxième Page. Crédits photos de l’article : © Youri Lenquette, Stephen Voss, JF Paga, John Midgley, DR