Les coups de cœur de Think tank by 2P
Who Gave You the Right to Tell That Story? : « Qui t’a donné le droit de raconter cette histoire ? » Voilà la question que pose Lila Shapiro à 10 auteurs-rices pour Vulture. Un sujet qui provoque des discussions parfois virulentes dans la vie et sur la Toile. Mais qui peuvent être saines, si elles font avancer et donnent lieu à de réels échanges. Toutes les personnes interrogées ont imaginé des personnages ne correspondant pas à leur identité. Leurs propos dépassent la conversation très binaire que l’on retrouve trop souvent et viennent apporter un peu de nuance. Dans son introduction, Shapiro mentionne par exemple la mise en place d’un cours de création littéraire en ligne intitulé « Writing the Other » (« Écrire l’autre »), un projet mené par les écrivaines Nisi Shawl et Cynthia Ward, respectivement noire et blanche. Leur point de vue est le suivant : écrire est une compétence, et écrire l’autre également. Une compétence peut être enseignée et apprise. Comme le rappelle la romancière Laila Lalami, « il n’y a pas de formule exacte. Ce n’est pas comme si vous pouviez donner une ordonnance à un-e auteur-rice : prends deux cuillères à café d’empathie et une goutte de recherche ». [Vulture] [ENG]
You Won’t Find Your Self-Worth on Instagram : on le sait, les réseaux sociaux peuvent avoir des effets néfastes sur notre santé mentale. De nombreuses études révèlent des liens entre leur utilisation et l’anxiété, la dépression, voire le risque suicidaire chez certain-e-s. Dans cette tribune, l’autrice Sheila Marikar rappelle qu’aller sur Instagram détruit l’amour-propre : « Autrefois, on blâmait les magazines et les publicités de Victoria’s Secret de perpétuer un style de vie et des canons de beautés inaccessibles pour les femmes. Désormais, avec l’omniprésence des réseaux sociaux, en particulier Facebook et Instagram, des femmes ordinaires sont accusées de donner à d’autres femmes le sentiment de ne pas être assez. […] Toute personne espérant trouver de l’estime de soi à la fin de son fil d’actualité le fera défiler pendant un bon moment. Il vaut probablement mieux regarder ailleurs. » [The New York Times] [ENG]
- Women Scientists Launch a Database Featuring the Work of 9,000 Women Working in the Sciences : le nom du projet communautaire 500 Women Scientists est trompeur, puisque sa base de données contient les travaux de quelque 9 000 femmes travaillant dans les sciences. Le but est évidemment de les visibiliser dans un domaine encore dominé par les hommes : « Trop souvent, les articles très médiatisés, panels de conférences et autres conseils d’administration sont remplis d’un nombre disproportionné de voix masculines. Les articles d’actualité sont écrits par une large majorité d’hommes, et ce déséquilibre se reflète dans la fréquence à laquelle les femmes sont citées dans les reportages, à moins que les journalistes ne fassent un effort conscient pour les contacter. » 500 Women Scientists constitue donc désormais une ressource incroyable accessible à tou-te-s. [Open Culture] [ENG]
- France Announces Tough New Measures on Immigration : la France a beau avoir une belle devise, celle-ci ressemble de plus en plus à un slogan publicitaire pour cacher la xénophobie de ses dirigeant-e-s. Les mesures récentes annoncées par Emmanuel Macron au sujet de l’immigration n’ont qu’un but : récupérer les votes de l’extrême droite, et ce aux dépens de vies humaines. Le traitement réservé aux migrant-e-s en France depuis des années est une honte. À Paris, comme le rappelle le New York Times, les personnes sont régulièrement expulsées de sites spécifiques, « les amenant à se déplacer ailleurs, dans un jeu de chat et de souris continu » avec les autorités. Selon Yann Manzi, président de l’association Utopia 56, « depuis l’été dernier, le gouvernement s’efforce de fermer ces camps sans offrir de solution à celles et ceux qui se retrouvent dans la rue ». Quand notre président joint la parole aux actes, il semblerait que ce soit dans le seul but de bafouer les droits humains. [The New York Times] [ENG]
- Servilité, inégalité, maternité : comment le mythe de la mère idéale a muté pour encore plus nous accabler : Illana Weizman est mère depuis un peu plus d’un an. Elle revient dans cet article sur les conséquences de ce statut sur son identité et sa santé mentale. Influencée par les images idéalistes de la maternité, Illana s’est totalement dévouée à son enfant, au point de se vider de son énergie, et jusqu’à en faire une dépression. « On parle beaucoup de ce qu’un enfant apporte. Mais on nous cache une partie de l’histoire, la partie de ce qu’il nous retire », explique-t-elle. Elle ose exprimer les sentiments ambivalents envers son fils qui la traversent : « Une joie fourmillante mêlée à un sentiment diffus d’enfermement, un amour innommable sur lequel se superpose un violent sentiment d’emprisonnement. Comment trouver un épanouissement dans notre statut de mère si celui-ci orbite autour d’images et de situations idéalisées qui ne correspondent pas, peu, pas tout le temps, à la réalité ? » [Cheek Magazine]
Sur les étagères et dans les oreilles de Deuxième Page
- #Bibliotheque2P, le livre de la semaine : lire La Femme gelée, c’est s’assurer un goût amer dans la bouche et un frisson dans le dos. On se demande si l’on a pris les bonnes décisions, si on les prendra, et s’il est encore possible de revenir sur ses pas. Car il s’agit pour Annie Ernaux de questionner et de dénoncer la violence de la solitude des femmes dans l’enfermement du foyer. Y a-t-il un salut possible au sein du modèle traditionnel ? C’est là tout ce que l’ouvrage questionne. En narrant les errances domestiques et intellectuelles d’une jeune femme mariée trop jeune à un homme pas assez progressiste en dépit des apparences, l’autrice met le doigt sur une problématique toujours aussi brûlante : celle du renoncement des femmes et de leur aliénation dans le couple hétérosexuel. Lire La Femme gelée est douloureux, mais absolument nécessaire pour se rappeler que l’ordre établi du patriarcat dans nos foyers doit être renversé. Le récit donne envie de faire la révolution, une révolution domestique, infiniment politique.
- Passion podcasts, l’émission à écouter cette semaine : si tu aimes l’histoire, écoute tous les épisodes de Magma. Si tu n’aimes pas l’histoire, cours les écouter. Clémence Hacquart s’est donné comme objectif de faire aimer cette discipline à tou-te-s les réfractaires du genre grâce aux témoignages des « anonymes de l’histoire », comme elle les appelle. Dans ce podcast qui brasse large, tu découvriras à la fois des événements totalement inconnus du grand public et des dates clés de notre époque sous un nouvel angle : celui de l’humain-e, de sa trajectoire personnelle, de l’émotion et du son. Le travail sonore est justement formidable, et encore plus depuis que l’émission est coproduite par le studio Nouvelles Écoutes. On te conseille tout particulièrement les épisodes sur les années sida, le 11 septembre 2001 et l’ex-otage des frères Kouachi, Michel Catalano. Mais on parie qu’une fois que tu en auras écouté un, tu voudras tous les connaître.
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- Dumbo de Tim Burton, ou quand l’imaginaire échoue à se réinventer : le Dumbo de Burton est un paradoxe. Fruit de l’empire consumériste de Disney, il fait une implacable critique du capitalisme et de ses conséquences dans le milieu artistique. Mais cela suffit-il ?
- Journal du cancer, la résilience poétique selon Audre Lorde : dans Journal du cancer, Audre Lorde raconte le douloureux parcours de la maladie et nous embarque dans son combat, entre création poétique et questionnement politique. Un concentré de beauté et de résilience, à lire absolument.
- Tribune : Ce que Le Seigneur des anneaux m’a appris sur mon féminisme : l’exposition sur J. R. R. Tolkien à la Bibliothèque nationale de France à Paris, nous donne envie de te repartager cette magnifique tribune sur Le Seigneur des anneaux, et sur l’impact que l’œuvre a eu sur Annabelle.
- Quand Ogawa Ito nous invite au restaurant de l’amour retrouvé : Le Restaurant de l’amour retrouvé, d’Ogawa Ito, nous apprend que l’on peut cuisiner pour aider les gens à vivre heureux, en respectant la nature. C’est une invitation à nous nourrir d’aimer. Un livre délicat à déguster.
- Corps sonores de Julie Maroh, les belles mélodies d’un chant d’amour : Corps sonores, la bande dessinée de Julie Maroh, nous raconte l’histoire d’une relation amoureuse à travers des récits et vécus multiples. Toutes ces voix résonnent en nous, en une délicieuse et intime musique, celle de l’amour.